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Auteur
Christine Bolinne Auteure
Date
23 mai 2024
Catégories
Cathédrale
Type
Cathédrale Saint-Aubain : non, ce n’est pas du marbre !
Isabelle Klein, un fin pinceau à la main, est concentrée. La restauratrice masque les très nombreuses marques blanches autant de traces des réparations effectuées, des enduits posés par Olivier Jamsin, staffeur. Un chantier mené, à quatre mains, sur les soubassements qui courent tout au long de la cathédrale Saint-Aubain de Namur ainsi qu’autour des lourds piliers. Un chantier qui interpelle les nombreux visiteurs. Un chantier qui révèle encore la véritable nature de ce soubassement… Sacrée surprise !
Mais pourquoi peignez-vous le marbre ? Cette question, Isabelle Klein l’entend très régulièrement. Et, à chaque fois, la fait sourire. Des habitués de la cathédrale Saint-Aubain comme les visiteurs d’un jour constatent, grâce à ce chantier, que ce qu’ils ont pris pour du marbre est en fait un mur sur lequel un artiste a peint. Il a reproduit le marbre avec ses variantes de couleurs, ses veines plus ou moins importantes… L’effet est saisissant. Bluffant. Et ce, depuis des dizaines d’années. Mais au fil des années justement, ces soubassements présentaient d’évidents signes de fatigue. Ils se devaient de passer entre les mains de spécialistes. A plusieurs endroits, des morceaux se décollaient pour finalement tomber. Sans oublier les coups inévitables dans un lieu aussi fréquenté.
Le conseil de fabrique a donc décidé de procéder à une remise en état. Un chantier confié à deux restaurateurs. Olivier Jamsin est le premier à être intervenu. Un staffeur spécialiste dans la réalisation, dans la rénovation de corniches, de plafonds… Il a véritablement ausculté ces soubassements, a fait tomber ce qui ne tenait plus… Cela étant fait, il a posé de l’enduit sur lequel Isabelle Klein intervient aujourd’hui et pour quelques semaines encore. Cet enduisage doit être le plus fin possible d’où de nombreux ponçages. Le plus régulier aussi. Le tout pour garder cet aspect plane qui fait illusion. Olivier Jamsin pour mieux faire comprendre son intervention la compare à celle du peintre lorsqu’il prépare les murs avant de les couvrir de peintures ou encore de papier peint. La difficulté ? Utiliser un enduit qui adhère au support de pierre bleue qui résiste aux variations de températures. Mission, aujourd’hui, accomplie.
Place aux couleurs
Olivier Jamsin vient de passer le flambeau à Isabelle Klein. Elle a devant elle un nombre important de récipients contenant de la peinture acrylique pour une meilleure stabilité. Une série de teintes toutes différentes qu’elle utilise avec dextérité pour rendre à l’ensemble son aspect du marbre. « Je réinvente le marbre là où il s’est décollé » raconte l’artiste qui est aussi restauratrice en patine et doreuse à la feuille d’or. Un travail tout en minutie. Elle vient de tremper son pinceau dans une couleur qui se rapproche du rouge brique et d’un geste précis recouvre la précédente réparation. Et d’ajouter : « Chacun sa spécialité autrement c’est du bricolage. »
De la peinture qui doit donc recouvrir l’enduit laissé un peu partout par Olivier Jamsin. Un chantier important mais qui ne la désespère pas ! Elle a juste mesuré, histoire de se rendre compte de l’ampleur de la restauration, un des piliers. Un pilier toutes faces cumulées correspond à un soubassement de douze mètres de long sur environ 1m50 de haut. Et il y a déjà six piliers !
Isabelle Klein est concentrée et n’apprécie que moyennement d’être interrompue dans son travail. Elle confie que chaque chantier est un défi à relever. « J’ai la chance de travailler, chaque fois, dans de très beaux cadres : des maisons classées, des églises… » Son talent permet de faire perdurer le travail d’autres. Isabelle Klein n’aurait-elle jamais eu envie de signer ses propres créations ? La réponse fuse : « Non. Dans la restauration, je m’inscris dans l’histoire d’un bâtiment. Aujourd’hui, quand un artisan créée, il n’est pas à l’abri de ne plus être, un jour, à la mode et de voir ce qu’il a fait détruit… »
C.B.
