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Auteur

Christine Gosselin Auteure

Date

18 novembre 2024

Catégories

Pastorale des Solidarités
Vocation

Type

Actualités diocésaines
Témoignages

Rencontre avec Sœur Marie-Claire Mélot : « Créer avec ce qui est là »

Entre deux voyages en République centrafricaine, nous avons eu la chance de rencontrer Sœur Marie-Claire Mélot, nouvelle présidente de la régionale namuroise de Justice & Paix depuis le début de cette année. Son parcours est marqué par un engagement profond et une approche pragmatique de la solidarité et de la justice.

Comprendre pour mieux agir

Justice & Paix est une organisation d’éducation permanente qui œuvre pour plus de paix et de justice en sensibilisant les citoyens, les responsables politiques et les acteurs de l’éducation aux questions de conflits, de démocratie et d’environnement. Cette année, c’est le droit fondamental au logement qui est au cœur de ses travaux. Sœur Marie-Claire, la nouvelle présidente de la section namuroise, explique :

« Le droit au logement décent est loin d’être une réalité pour tous sur notre continent et dans notre pays.  Ce constat risque de se creuser encore avec la montée des partis d’extrême droite et des nationalismes, mis en évidence lors des récentes élections en Belgique et en Europe, qui cristallisent des attitudes de rejet face aux ‘non’ nationaux de souche et le sentiment de déclassement d’un ensemble de personnes. Les inondations de 2021 et autres effets désastreux du réchauffement renforcent encore la précarité d’un public déjà fragilisé.  Or l’accès au logement (en coût et en qualité) est fondamental ! Il influe sur la santé, l’accès aux services, à l’éducation et aux services culturels, autant en milieu rural qu’urbain. Cet état des lieux souligne l’urgence de mener une réflexion globale et des actions autonomes articulant les enjeux écologiques et sociaux ».

Une vie d’engagement dans la formation

Sr Marie-Claire est originaire d’Havelange. Institutrice , elle a la formation dans le sang. Au début de sa carrière, elle  enseigne à l’école des filles de Dunes et Bruyères,  une expérience qui l’a particulièrement marquée.

Sr Marie-Claire « C’était un centre pour les jeunes défavorisés . Le cadre était splendide dans un ancien château au milieu d’un parc à Serinchamps; un endroit sécurisant avec des grands espaces. C’est incroyable comme le logement est important pour le développement des enfants… Je me rappelle les logements de certains d’entre eux, tellement étriqués et avec pour sol, uniquement la terre battue. Au château, les enfants pouvaient courir, faire des cabanes dans le parc, se promener dans les bois… »

Malheureusement, faute de subsides, l’ASBL Dunes et Bruyères, a dû fermer ses portes fin des années 80. Il aura changé la vie de centaines d’enfants. « Même loin de leur parents, les enfants y étaient heureux. Nous écrivions de longues lettres aux parents tous les vendredi » se souvient Sr Marie-Claire. Elle-même ressentira plus tard, lors de ses nombreuses missions comme sœur dominicaine, cette importance de maintenir du lien avec les proches quand on est au loin.

Un processus de création ancré localement

En tant que dominicaine, une première mission conduira Sœur Marie-Claire au Rwanda, juste après le génocide, pour enseigner la religion dans une école sociale de Byumba, puis , dès le début des années 2000, en République Centrafricaine.. Un nouveau diocèse vient d’être fondé à Mbaïki et Sr Marie-Claire est appelée à participer à la redynamisation des écoles catholiques à partir du petit village de Mbata, en pleine forêt équatoriale. Dès le début, le travail s’initie dans le cadre d’un partenariat entre les autorités locales, le nouvel évêque et la communauté.

« C’est très important ! souligne Sr Marie-Claire. Nous ne sommes pas venus en imposant nos vues, mais en réponse à une demande du terrain, pour construire avec les moyens locaux et dans le dialogue. J’aurais pu amener des valises entières de notre pays, mais sans ancrage local, ce que j’aurais amené serait resté éphémère. La construction, la création demande d’être patient, humble, à l’écoute. Dans ce pays secoué par les conflits et les guerres incessantes, il faut créer avec ce qui est là ».

Trois axes ont été définis : renforcer le système de santé, la promotion/éducation de la femme et l’enseignement. Sœur Marie-Claire se voit confier les maternelles : le premier grand défi était de trouver et de former des maîtres… Grâce à un partenariat avec une école de Bangui, Sœur Marie-Claire envoie quelques jeunes dames se former dans la capitale pour enseigner ensuite au village. Des « agents-parents », (quelques parents qui savent un peu lire ou compter) complètent l’encadrement. Ils sont formés en pédagogie durant les vacances scolaires.

Mais très vite les locaux viennent à manquer devant l’affluence des petits élèves. Il faut alterner les maternelles le matin et les primaires l’après-midi. Il faut trouver une solution qui se profile dans la construction de nouveaux bâtiments sur les anciens terrains de la mission. Six classes de primaire et une école maternelle. Près de 100 enfants en maternelle pour 700 en primaire où les classes oscillent entre 60 et 70 enfants. « On utilisait les vastes étendues de terres devant l’école comme terrain d’apprentissage. On jouait, on écrivait à même le sol. La pauvreté est totale. Il n’y avait pas d’eau, ni d’électricité à l’école. »

Sr Marie Claire est restée 17 ans dans le village de Mbata. Pour l’anecdote : en sango, la langue locale, Mbata signifie « je reste ». Et il ne fait aucun doute que Sr Marie-Claire y a laissé son cœur. Sr Prunelle, une sœur centrafricaine, a repris les rênes de la formation pour l école maternelle et les sœurs dominicaines d Afrique poursuivent et amplifient la mission de Mbata.

Depuis 2017, Sr Marie-Claire s’investit par ailleurs en Belgique dans la pastorale des gens du voyage et dans la commission Justice & Paix. « C’est toujours le même combat pour que justice soit rendue à des populations qui n’élèvent même pas la voix ».


Christine Gosselin

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