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Auteur

Diocèse de Namur Rédacteur
Date
18 janvier 2025
Catégories
Oecuménisme
Type
Quand des catholiques et des protestants s’unissaient contre les Allemands
La Seconde Guerre Mondiale vit catholiques et protestants s’opposer en nombre à l’occupant. A l’occasion de la semaine pour l’unité des chrétiens retour sur un pan de la résistance spirituelle française qui rassembla catholiques et protestants : Les Cahiers du Témoignage chrétien.
16 novembre 1941. A destination de toute la France, débute à Lyon la diffusion d’un périodique résistant d’esprit chrétien, les Cahiers du Témoignage chrétien.
Les Cahiers du Témoignage chrétien trouvent leur origine dans les années trente. Le père jésuite français Pierre Chaillet est en Autriche, alors annexée par l’Allemagne. Il y est témoin de la montée du nazisme et rédige dès 1939 L’Autriche souffrante, où il y dénonce les persécutions contre catholiques et Juifs. La Seconde Guerre mondiale est déclarée, l’Allemagne envahit la Pologne, puis la France en juin 1940, et un an et demi après la défaite française paraissent les premiers Cahiers. Ils sont alors basés à Lyon, au théologat jésuite de Fourvière. L’organe comptant en son sein catholiques et protestants, par souci d’œcuménisme, le titre original est modifié. Témoignage catholique devient Témoignage chrétien.
Vingt-neuf Cahiers paraissent entre novembre 1941 et juillet 1944. De petit format (13,5x21cm) et tirés à 50.000 exemplaires, ils marquent leur spécificité au sein de la presse résistante en insistant sur le combat spirituel, basé sur les Évangiles et les valeurs chrétiennes. Et ce avec des dossiers tels que France, prends garde de perdre ton âme (Novembre 1941), qui insiste sur l’incompatibilité entre nazisme et valeurs chrétiennes, Droits de l’homme et du chrétien (Juin-juillet 1942), ou Alsace et Lorraine terres françaises (Octobre-décembre 1943).
Outre Pierre Chaillet, citons comme auteurs le pasteur Roland de Pury, et l’abbé Pierre Bockel, futurs Justes parmi les Nations, Robert d’Harcourt, futur promoteur de la réconciliation franco-allemande ; mais aussi des Pères jésuites tels que Gaston Fessard, anti-vichyste, Yves de Montcheuil qui, capturé comme aumônier du maquis du Vercors, fut fusillé à Grenoble le 11 août 1944 ; sans oublier le futur cardinal Henri de Lubac, professeur de théologie à Lyon, qui devra finalement poursuivre clandestinement son engagement. D’autres auteurs de renom sont à signaler : Georges Bernanos, François Mauriac et Jacques Delors;
La Libération ne marque pas la fin de la publication, qui continue à paraître après la guerre en abordant des thèmes majeurs comme la décolonisation et les enjeux du Proche-Orient. En 1949, le tirage atteint 100 000 exemplaires, mais dès les années 1970, des difficultés financières entraînent un déclin. Plusieurs fois reprise et remaniée, la publication parvient à éviter la disparition totale. Depuis 2018, elle se présente sous la forme d’un mook (livre-magazine-revue) trimestriel tiré à 10 000 exemplaires, témoignant encore aujourd’hui de la force d’hommes et de femmes qui, face aux épreuves, ont uni leurs efforts au-delà de leurs différences, marchant ensemble en pèlerins d’espérance.
François-Emmanuel Duchêne, sacristain de la cathédrale