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Auteur
Christine Gosselin Auteure
Date
16 juillet 2025
Catégories
Pastorale Interculturelle et des Migrants
Type
Au cœur de la pastorale des forains à Namur : sous les chapiteaux de la foi
En ce mois de juillet, la pastorale des forains du diocèse de Namur s’est déployée au plus près de ceux qui vivent la route. Deux temps forts ont marqué cette présence discrète mais essentielle : le pèlerinage à Notre-Dame au Cœur d’Or de Beauraing, du 6 au 12 juillet, et la messe des forains, le 15 juillet, sur le champ de foire de Namur. Retour sur ces moments où foi, itinérance et fraternité se sont rencontrées.
Un peuple de la route, enraciné dans la foi
Ils vivent dans le mouvement. Les forains, comme les gens du voyage, gardent dans leurs veines le goût de la liberté, du déplacement, et une manière singulière d’habiter le monde. Mais dans une société qui s’est figée autour d’un mode de vie sédentaire, leur culture et leur foi restent souvent en marge. « On leur a enlevé leur manière de vivre et de travailler, alors il ne leur reste que leur culture. Et c’est par là qu’ils existent », souligne Nicolas Dumont, délégué épiscopal à la pastorale de la solidarité.
En Belgique, les gens du voyage sont devenus semi-nomades, contraints par l’obligation d’avoir une adresse de référence. Mais les forains, eux, restent résolument itinérants. « Attention à ne pas confondre, avertit encore Nicolas Dumont. Les évangéliques français qui organisent leur rassemblement annuel près d’Erpent n’appartiennent pas à cette pastorale catholique. Ce sont d’autres traditions, d’autres repères. »
À Beauraing, la prière s’installe en caravane
Du 6 au 12 juillet, une vingtaine de caravanes ont trouvé refuge non loin du sanctuaire de Beauraing. Le pèlerinage, préparé par les familles elles-mêmes, a été accompagné par la pastorale diocésaine : l’abbé Philippe Coibion (vicaire épiscopal à la diaconie, émérite) et Sœur Marie-Claire Mélot ont vécu la semaine avec les pèlerins.
« Chaque jour, une célébration, un moment fort, une prière partagée : chapelet d’accueil, bénédiction des caravanes, veillée aux flambeaux accompagnée de chants aux sons de la guitare, messe des malades, messe pour les défunts… Le samedi, la semaine s’est conclue par des sacrements de vie : un enfant de dix ans à reçu le sacrement de confirmation, tandis que trois baptêmes étaient célébrés durant l’après-midi » explique l’abbé Coibion.
« Ce n’est pas une pastorale de passage, insiste l’abbé Alain Goffinet, aumônier des forains. Nous construisons des liens durables, et de plus en plus de demandes de confirmation ou de sacrements arrivent. Cela se fait dans la durée, en famille. »
À Namur, une messe rigoureuse et festive au cœur de la foire
Ce 15 juillet à 11h, au beau milieu des manèges et des odeurs sucrées de la foire de Namur, un espace sacré s’est dressé. C’est la 12e année que l’abbé Alain Goffinet, avec la paroisse Saint-Nicolas, célèbre la messe des forains dans cette chapelle démontable qu’il dresse avec soin. Une liturgie rigoureuse, mais vivante, adaptée à ce peuple festif où l’on peut retrouver différents symboles du monde forain, tels que le hérisson.
L’abbé Pierre Dujardin, curé de Saint-Nicolas, accueillait cette célébration dans une ambiance conviviale et priante. Dans son homélie, l’abbé Alain reprenait les mots de Moïse à Dieu : « Qui es-tu ? » — « Je suis celui qui suis » —, rappelant l’invitation du Christ : « Venez à moi, vous qui peinez sous le poids du fardeau. » Une parole qui rejoint les forains dans leur réalité quotidienne.
La messe était animée par des chants revisités, comme ce Cantique de Daniel sur l’air des Lacs du Connemara. Et pourtant, rien n’est laissé au hasard : « Tout est à l’image de l’Église universelle, dans une fidélité à la liturgie », explique l’aumônier. Forains, paroissiens, autorités locales, tous étaient présents pour ce moment fort et incontournable de la foire de Namur.
La messe des forains, comme le pèlerinage de Beauraing, sont les fruits d’une pastorale qui incarne cette Église en sortie chère au pape François : une Église en chemin pour rejoindre ces familles en route, leur offrir des sacrements là où ils vivent, créer des ponts entre une Église territoriale et un peuple mobile. « C’est aussi une manière de dire : vous avez votre place dans l’Église. Et cette place, elle est belle », conclut l’abbé Goffinet. Foi, fête, fidélité : un trio qui résume bien cette pastorale de la route.
Christine Gosselin