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Auteur
Christine Bolinne Auteure
Date
18 août 2019
Catégories
Belgique
Evêché
Folklore
Liturgie
Patrimoine
Type
La chapelle Saint-Marcoul à Fays-Famenne, c’est fini
Même le ciel, comme le fera remarquer l’abbé Christophe Malisoux, s’était mis au diapason. De lourds nuages gris et une fine bruine ont accompagné la cérémonie d’exécration de la chapelle Saint-Marcoul à Fays-Famenne. Une météo bien triste à l’image du cœur des paroissiens de Fays-Famenne. Fermée depuis plusieurs années suite à la chute d’une partie du plafond et d’un mauvais état général, la décision est tombée : le culte n’y sera plus célébré. La statue de la Vierge, le Christ en croix, les croix de consécration, la pierre d’autel ont quitté – définitivement – la chapelle escortés par la Compagnie des Zouaves de Malonne et les reliques de Saint-Berthuin.
Fays-Famenne, dans l’entité de Wellin, un tout petit village au milieu d’un paysage à couper le souffle. Quelques petites dizaines de maisons ont trouvé leur place entre champs et bois…
La chapelle Saint-Macroul, depuis 1769, domine le village. Au fil des années, il n’a plus été possible de dissimuler les ravages du temps. De l’extérieur, la « vieille dame » donne encore le change malgré quelques carreaux cassés. A l’intérieur, c’est la désolation avec la chute d’une partie du plafond. Des plâtras jonchent le sol.
Après bien des années de tension, la décision a été prise: cette chapelle, propriété de la commune, a été fermée – il y a six ans maintenant – au culte et mise en vente. Une partie de l’argent de la vente servira à la construction d’un oratoire toujours à Fays-Famenne. Les deux cloches qui appelaient les fidèles aux célébrations ont été décrochées, l’une d’elle sera installée dans cet oratoire. Une cloche qui a reçu le nom de Marie-Antoinette Lambert, la sacristine qui s’est investie dans cette chapelle durant tant d’années.
1769 – 2019 : quasi trois siècles de vie pastorale
Comme l’a écrit l’abbé Christophe Malisoux aussi en charge des paroisses de Sohier et de Froidlieu « le fait de vivre l’exécration de la chapelle Saint-Marcoul constitue un échec pastoral. Aucun prêtre n’est ordonné pour ‘célébrer’ la désaffectation d’un lieu de culte car cette célébration symbolise en quelque sorte les ‘funérailles’ de ce lieu de culte et donc, indirectement, la dissolution de la communauté paroissiale qui y est attachée, au sein de laquelle le prêtre est pourtant nommé pour la servir et l’accompagner pastoralement. »
Depuis près de trois siècles, de 1769 à 2019, la chapelle aura été un témoin privilégié de la vie des hommes et des femmes de Fays-Famenne. Quelques chiffres. Depuis 1900, 65 enfants y ont été baptisés, 42 couples s’y sont mariés. On y a encore célébré les funérailles de 120 personnes. Une chapelle comme il le sera rappelé qui a accueilli les joies et les peines d’une communauté paroissiale. Et samedi, malgré une météo bien maussade, les paroissiens de Fays-Famenne mais aussi des paroisses avoisinantes étaient présents. Ils étaient venus en pèlerinage dira l’abbé Malisoux. Un curé qui se veut optimiste : « Dieu nous invite à rester debout dans la foi là où on vit. » Une paroissienne aura ces mots : « Nous pensions notre église éternelle à l’image des ancêtres qui l’ont construite. Et aujourd’hui, ce 17 août 2019, nous y sommes. Nous nous devons de faire le deuil de l’église. » Françoise, une autre paroissienne lira, elle, un texte de Charles Baudelaire, « La cloche fêlée » un texte tout en mélancolie.
« Dieu nous invite à rester debout dans la foi là où on vit. »
Abbé Malisoux
L’émotion montera d’un cran lorsque la statue de la Vierge tenant dans ses bras l’Enfant Jésus est sortie, sur un brancard, portée à dos d’homme. Une statue suivie de celle du Christ en croix. Les enfants repartiront eux avec les croix enchâssées dans les murs. Des croix bénies le jour de la consécration de la chapelle. Ils lâcheront des ballons qui, très vite, s’envoleront dans un ciel désespérément gris. Les ballons lâchés un peu plus tôt à laquelle une enveloppe à l’adresse de « Dieu dans le ciel » n’auront pas la même chance : ils finiront dans l’arbre tout proche !
Une dernière photo
La statue de la Vierge, la Croix, la pierre d’autel et les deux cloches joliment enrubannées ont été posées sur une remorque tractée par un tracteur. La Compagnie des Zouaves de Malonne a tiré deux salves avant d’ouvrir cette marche-procession. Les paroissiens mais aussi les amoureux du patrimoine, de l’histoire locale ont emprunté la petite route sinueuse qui devait les mener à Sohier où les reliques de saint Berthuin ont été présentées à la vénération. Le soir, Mgr Pierre Warin présidait, à Froidlieu, la célébration marquant les 250 ans de la dédicace de l’église Saint-Barthélemy. Samedi, les paroissiens comme leur curé sont passés par bien des émotions.
Beaucoup avaient tenu, avant cette cérémonie d’exécration, à franchir une dernière fois, la porte de leur chapelle. Ils ont encore immortalisé les lieux en prenant des photos qu’ils partageront avec les générations à venir. D’autres ont préféré, simplement, graver à jamais les images dans leur mémoire. Gravée aussi l’odeur qui imprègne les lieux : un mélange de poussière, d’humidité.
Le calme revenu, le coq qui avait accompagné de ses tonitruants cocoricos cette cérémonie pouvait goûter à un peu de repos…
Christine Bolinne