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Auteur
Christine Gosselin Auteure
Date
15 mars 2024
Catégories
Patrimoine
Tourisme
Type
L’église Notre-Dame de l’Assomption de Tintigny et la chapelle Notre-Dame du Chenois
L’église Notre-Dame de l’Assomption domine le centre du village. À côté de la place et en face de l’Administration communale, elle se dresse fièrement au sommet d’une double volée d’escaliers s’effaçant devant un large parvis entouré de rambardes à balustres surmonté d’un lion de pierre. On trouve dans cette jolie église l’un des plus beaux ensembles mobiliers de style baroque (18e siècle) du Sud-Luxemboug. Un bâtiment à l’architecture particulière qui vient d’être restauré – tout comme la chapelle Notre-Dame du Chenois, située à la sortie du village vers Saint-Vincent.
« L’église actuelle a subi de nombreuses transformations. Il y a eu un ouragan, la Révolution, les guerres… explique Monsieur Clauss, notre guide.
Lorsque l’église a été construite en 1602, comme l’indique le millésime gravé dans le mur de la chapelle des Seigneurs de Villemont, le clocher en bois était directement posé sur la nef tandis que le clocher actuel, une tour carrée, massive, devant la nef date de 1895, presque 300 ans plus tard. On trouve encore à l’entrée du petit cimetière entourant l’église, la croix en fer qui surmontait l’ancien clocher. La dernière restauration de l’église en 2020, lui a également supprimé la petite croix que portait le Coq de saint Pierre en haut du clocher et qui signait la présence dans l’église d’une relique de la Vraie Croix. »
En suivant notre guide dans l’église, nous remarquons tout d’abord les arcs brisés et en plein cintre des nefs. Jackie Clauss nous indique les armoiries des familles de Barbanson qui régnèrent sur Tintigny (Villemont) au début du XVIIe. Ces Seigneurs pouvaient suivre la messe et surveiller les fidèles depuis leur chapelle grâce à une baie qui y avait été percée. Actuellement cette chapelle est devenue la sacristie …
Pour ceux qui auraient l’occasion de s’y aventurer on y trouve un étonnant tableau, clin d’oeil de Bonju à la République : une vierge à l’enfant qui a les traits de Laetitia Bonaparte tandis que Jésus est représenté sous les traits de Bonaparte lui-même !
Avant d’entrer dans le chœur M. Clauss nous invite encore une fois à lever les yeux : sur la clé de voute un œil nous regarde et nous pouvons lire l’inscription « Dieu voit tout ». Et il y a de quoi voir dans ce chœur ! L’autel majeur très élégant se distingue par la richesse et la délicatesse de ses ornements. De style renaissance, il est réalisé en chêne polychrome et doré. Une niche accueille une sainte Vierge enlevée au ciel par des anges.
C’est Notre-Dame de l’Assomption à laquelle les Pères Jésuites de Luxembourg, qui étaient, alors, desservants de l’église, dédièrent l’église en 1733. À gauche et à droite de l’autel on remarque d’ailleurs Saint Ignace de Loyola, fondateur des jésuites et Saint François-Xavier, patron des missions. Ils sont entourés par saint Ambroise, saint Eloi, saint Laurent et Notre-Dame du Luxembourg ornée de trois colliers et trois ceintures (représentant le tiers état, le clergé et la noblesse).
« Toute la statuaire, remarquable, a probablement été réalisée par African Sançi, sculpteur à Arlon, décédé en 1722-1723. Elle est donc antérieure à cette date » explique M. Clauss. Un buste en relief de saint Jean très finement réalisé, décore encore l’autel à retable tandis qu’un saint Joseph à l’Enfant se trouve dans une niche au-dessus de Notre-Dame. Le cortège des saints se prolonge tout le long de la nef centrale où sainte Marguerite, sainte Lucie, sainte Catherine, saint Isidore, saint Denis, saint Jacques de Compostelle, saint Jean Népomucène, sainte Barbe, semblent former une haie d’honneur jusqu’au chœur. Les stalles des deux côtés du chœur datent de la même époque, de même que la chaire de vérité finement sculptée. Et on peut encore admirer, bien-sûr, les très belles représentations de quatre grands docteurs de l’église dans le fond du chœur : saint Ambroise de Milan, saint Augustin, saint Jérôme et saint Thomas d’Aquin. Les 4 évangélistes accompagnés de leur figure symbolique sont également peints à l’avant du choeur.
Ils pourraient être attribués au frère Abraham d’Orval. Nous retrouvons aussi notre ami Saint-Walhère déjà rencontré à Onhaye ou Hastière. L’autel latéral de gauche lui est consacré. À Tintigny on le connait sous le nom « gaumais » de saint Bohy. Une relique de ce saint fut offerte à la paroisse en 1754 pour la vénération des fidèles. Un vitrail de l’église retrace également son martyre. L’église est classée depuis 1988.
Que faire à proximité ?
À deux kilomètres de l’église de Tintigny, à l’orée du village de Saint-Vincent, au milieu des tilleuls qui remplacent aujourd’hui les chênes, est blottie la petite chapelle N.-D. du Luxembourg aussi appelée N.-D. du Chenois où le culte de la Vierge Consolatrice des affligés est encore très vivant. Lire plus
Il y a toujours une bougie qui brûle, des ex-votos ou des fleurs déposés par ceux qui s’arrêtent et trouvent là ce qu’ils cherchent : réconfort, espoir, sérénité. Le culte remonte à 1636, année où une effroyable épidémie de peste fit de grands ravages. On raconte qu’il ne restait à Saint-Vincent que deux maisons habitées. Les victimes furent si nombreuses qu’on dut les inhumer à l’orée d’un bois de chênes à proximité du village, ce qui donna le nom de « Chenois » à ce plateau dominant Saint-Vincent. Une statue de la Vierge fut fixée à l’un des chênes qui désignèrent, pendant deux siècles, le lieu où reposaient les victimes de la peste. En 1836, un petit sanctuaire destiné à protéger la statuette fut érigé. Cent ans plus tard encore, il reçut un porche à colonne pour l’agrandir ainsi qu’une belle grille en fer forgé. En 1917, un cimetière militaire allemand fut installé derrière la chapelle pour y faire reposer les dizaines de victimes de la bataille du Chenois du 22 août 1914. Le cimetière a aujourd’hui disparu. Seule subsiste une croix latine ornementale à l’arrière de la chapelle. Il existe toujours un pèlerinage annuel des paroissiens de Saint-Vincent et des villages des environs ; il a lieu le 5e dimanche après Pâques.
Christine Gosselin