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Auteur
Christine Gosselin Auteure
Date
20 novembre 2025
Catégories
Belgique
Pastorale des Solidarités
Type
Témoignages de la journée mondiale des pauvres avec le diocèse de Namur !
Organisée par les pastorales de la solidarité, la Journée mondiale des pauvres — dont le pape François est l’initiateur — est un événement interdiocésain qui se déroule chaque année au sanctuaire marial de Banneux. Cette année, les provinces de Namur et Luxembourg s’y sont rendues en nombre : une bonne soixantaine de personnes venues de l’ensemble de ces provinces, des acteurs pastoraux, des familles, des personnes sans domicile fixe également, ont rejoint les pèlerins des autres diocèses.
« Il s’agissait de vivre pendant deux jours une expérience d’Église à l’école de la parole des plus pauvres. » Durant ce temps suspendu, l’abbé Pierre Dujardin parle d’« un petit nuage de cohabitation » : les participants vivent ensemble des temps de prière, d’ateliers et de convivialité sous le regard aimant de Marie. Acteurs pastoraux et personnes précarisées partagent leurs fragilités et leurs forces, faisant l’expérience que le Christ est en chacun de nous. La synodalité n’est pas un mot : elle est une attitude, une disposition du cœur.
Dans la continuité de la session théologique vécue à Beauraing et de la Journée mondiale des pauvres, le service de la solidarité du diocèse de Namur participe à la création d’un « Réseau Saint-Laurent » belge. Un premier groupe se réunira à Namur, au « Vi Clotchi », le 27 novembre à 15h, pour partager un moment de chaleur humaine et vivre l’expérience de Dieu à partir de l’existence de chacun, éclairée par la Parole.
Témoignages
Abbé Pierre Dujardin : « Reporter l’élan de ce week-end dans le quotidien… au cœur d’un groupe Saint-Laurent »
« C’est la première fois que je participais à cette journée. Ce qui est incroyable, c’est le soin apporté pour que chacun, quel qu’il soit, se sente accueilli. Le sanctuaire de Banneux a ce don de recevoir chaleureusement, avec le souci du détail : des lits faits avec des draps frais, une équipe de bénévoles très souriante, des produits de toilette, des jeux pour enfants, un vestiaire où chacun peut se servir gratuitement… »
Des ateliers variés étaient proposés, permettant à chacun de trouver sa place et de se sentir à l’aise, libre de participer ou non. L’abbé Dujardin y est allé avec sept membres de la paroisse Saint-Nicolas, répondant à une sollicitation de la Pastorale de la Solidarité.
« Il n’est pas toujours évident de se libérer tout un week-end, mais un confrère de Lumen Vitae a pu me remplacer pour les célébrations. Nous avons donc embarqué à bord du bus affrété par la pastorale au départ de Namur », explique-t-il, heureux d’avoir finalement pu vivre l’expérience complète.
Le dimanche, plus de 350 personnes étaient présentes à la grande messe présidée par Mgr Kockerols. « Si nous devions dire ce que nous avons fait ce week-end, on aurait presque envie de dire que nous étions sur un nuage », résume l’évêque dans son homélie. Une organisation magnifique, des célébrations profondes et de riches moments de partage… mais il fallait redescendre de ce nuage : certains passeraient la nuit à la rue, tandis que d’autres rentreraient dans le confort de leur foyer.
« C’est précisément pour ne pas en rester là que nous souhaitons lancer un groupe Saint-Laurent », souligne l’abbé. L’idée est de prolonger l’élan de ce week-end dans le quotidien, à travers un espace de fraternité et de partage biblique, inspiré par saint Laurent qui disait : « Je vais vous apporter la richesse de l’Église », une richesse offerte à tous, quelles que soient nos pauvretés.
Sœur Marie-Justine Penge « Dans leur paroisse, ils sont ceux qui tendent la main, mais à Banneux, ils ont dansé devant l’autel »
Sœur de Sainte-Marie et collaboratrice du Service de catéchèse pour le pôle Cat & Vie, sœur Marie-Justine témoigne :
« Je suis allée à Banneux en soutien au Réseau Saint-Laurent. Inviter sans participer moi-même ne me semblait pas juste. J’ai donc pris le relais de sœur Grâce, repartie au Brésil. J’y allais pour accompagner, mais en réalité, nous nous sommes accompagnés mutuellement. Nous avons préparé ensemble ce que nous allions apporter pour l’auberge espagnole, retrouvé des personnes connues et fait de nouvelles rencontres. »
À Banneux, elle raconte avoir vécu un double choc : d’abord celui du nombre de participants — au moins 500 — puis celui de la qualité de l’accueil. « J’ai travaillé longtemps avec des personnes pauvres au Brésil. Ici, ce qui m’a frappée, c’est que la pauvreté est autant morale que matérielle. Au Brésil, les pauvres vivent entre eux et se parlent. Ici, la pauvreté jouxte la richesse, mais on ne parle pas de sa vie privée. À Banneux, tout le monde était sur un pied d’égalité, digne de respect. Nous portions tous les mêmes badges, les mêmes foulards, sans places réservées. Chacun s’asseyait là où il y avait de la place. Nous dormions dans des chambres similaires. Dans leurs paroisses, les pauvres sont ceux qui tendent la main devant l’église, mais à Banneux, ils ont dansé devant l’autel ! »
Une grande diversité d’ateliers était proposée : marche en forêt, danse, chant, partage spirituel, bien-être (coiffure, manucure…), écoute. « Quand une personne qui était dans le car avec moi en est ressortie, je ne l’ai presque pas reconnue : tout sourire, nouvelle coupe, nouveaux vêtements. ‘Je suis maintenant un bel homme’, m’a-t-il dit. ‘Tant que je suis propre, tu me fais un câlin ?’ »
Puis elle poursuit : « Tout était beau, bien organisé, et nous avons bien vécu, mangé, prié. Mais nos vies restent différentes. Certains, que je connais maintenant par leur nom et qui sont devenus des frères et des sœurs, retourneront à la rue, tandis que d’autres rentreront bien au chaud. »
Le service Cat & Vie souhaite désormais consacrer du temps à des partages bibliques au sein du Réseau Saint-Laurent.
Mireille et Émile Poncin « On est pauvre de ce qu’on ne connaît pas de l’autre… »
Diacre dans la région de Neufchâteau et Léglise, Émile Poncin porte une mission particulière en lien avec la pauvreté. « La pauvreté et tout ce qui touche la personne dans sa dignité nous interpellent beaucoup, Mireille et moi. C’est pour cela que nous souhaitions prier avec les pauvres à Banneux. Être avec eux est une chance. Ensemble, on peut prier et réfléchir. »
Il partage une parole qui l’a marqué : « Ensemble, avançons. Il est très important d’entendre la parole de l’autre, une parole dans laquelle on se reconnaît. Il y a aussi en nous une ‘pauvreté’ qu’il est nécessaire d’épurer. »
Émile distingue pauvreté et misère : « La pauvreté est un manque de tout, qui fait très mal. Mais la misère, c’est cela avec, en plus, la perte de dignité. La plus grande des pauvretés : ne plus savoir qui l’on est. »
Il souligne la messe du dimanche comme un moment fort : « Mgr Kockerols s’est voulu ‘serviteur parmi les serviteurs’, très proche des gens. Il salue chacun dans un langage simple, direct, qui relève et qui soulage. On en ressort réconforté. »
Émile et son épouse envisagent de revenir l’an prochain, peut-être accompagnés d’un groupe de la province du Luxembourg, pour participer à la dixième Journée mondiale avec les pauvres. « On est pauvre de ce que l’on ne connaît pas de l’autre… » conclut-il
Christine Gosselin
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